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Communiqués de presse

« Non à une loi qui confond malades et délinquants ! »

Les usagers (patients et familles) et les professionnels de la psychiatrie, représentés par les organisations soussignées tiennent à rappeler le caractère inacceptable du maintien des articles 18 à 24 dans l’actuel projet de loi sur la prévention de la délinquance.

Les articles en cause du projet de loi prévoient, en effet, que l’autorité administrative pourrait utiliser la procédure dite des « hospitalisations d’office » (H.O.) instituée par la loi du 27 juin 1990, dans le but de prévenir la survenance de faits délictueux.

Les signataires du présent communiqué qui assurent la plus grande part de la responsabilité de l’accompagnement dans la cité et des soins au quotidien des personnes malades, résument leurs arguments comme suit :

1° La loi de 1990 qui a prévu les « hospitalisations d’office » est une loi essentiellement sanitaire.

Certes, elle stipule parallèlement des mesures de sûreté destinées à protéger toutes les personnes concernées, mais seulement pendant un temps très court, dans l’attente des décisions des médecins. Ceux-ci se déterminent exclusivement en fonction de l’évolution de la santé et de la protection des personnes qui reste un objectif commun à tous les acteurs. L’hôpital n’est pas une prison.

Les troubles psychiques rendent difficile, parfois, l’acceptation des soins. Aussi la loi de 1990 a prévu trois dispositifs qui ne diffèrent que par la nature du demandeur des soins : on dit qu’il y a « hospitalisation libre » (HL) si la personne malade accepte les soins, « hospitalisation à la demande d’un tiers » (HDT) si l’intervention d’un proche s’avère nécessaire et possible, enfin « hospitalisation d’office » (HO) si l’autorité administrative doit se substituer à des proches absents ou non consentants au moment voulu. Ces trois procédures constituent un ensemble indissociable mis en œuvre par des acteurs qui cherchent à s’allier pour lutter contre les maladies. Dans tous les cas, il s’agit de faire en sorte qu’une personne, dont le comportement montre que des soins semblent nécessaires, soit bien prise en charge par des soignants. Ceux-ci décideront ensuite, avec la personne dans toute la mesure du possible, les modalités des soins jugés indispensables.

2° La procédure d’ « hospitalisation d’office » peut aussi intervenir suite à une procédure judiciaire, suite à un délit.

Les signataires ne contestent aucunement l’opportunité de décisions prises suite à une procédure judiciaire. Par contre, ils ne peuvent admettre que les H.O évoquées ci-dessus en 1° leur soient assimilées comme ayant obligatoirement la même origine. Dans le cas d’une demande de soins, il n’est pas question de délit, même si les soins participent indirectement, comme l’indique bien la loi de 1990, à la protection des personnes.

En conséquence, les signataires demandent que les dispositions concernant les H.O ne soient pas séparées des autres procédures (HDT et HL) qui relèvent de la même logique, essentiellement sanitaire, et que l’ensemble reste dans la perspective globale et équilibrée qui est celle de la loi de 1990.

Partageant les mêmes inquiétudes, le Conseil National de l’Ordre des Médecins souligne que ce projet comporte « une violation grave des droits à la vie privée et à l’intimité des patients ».

Si le gouvernement souhaite adapter des dispositions de la loi de 1990 pour tenir compte, en effet, des évolutions de l’environnement, il faut qu’il le fasse dans le cadre de la révision périodique prévue pour cette loi, en en conservant les principes généraux qui associent, à juste titre, les questions de santé, de justice et d’ordre public. Les signataires souhaitent collaborer à ces travaux en faisant part de leur expérience de terrain.

Toute autre approche susceptible d’alimenter une confusion entre maladie et délinquance prendrait en effet le risque d’être gravement contre-productive au regard du légitime souci de sécurité des citoyens. Car cet amalgame stigmatisant ne manquerait pas de freiner la demande d’aide des malades les plus en difficulté.

La gravité de la situation qui bafoue les principes de démocratie sanitaire de la loi du 4 mars 2002, amène les signataires à en appeler à la plus haute autorité de l’Etat en demandant une audience en urgence au Président de la République.